Traditionnellement perçue comme activité qui vise à découvrir l’ordre de la nature, à révéler l’ordre caché des choses, la science d’aujourd’hui se décode concomitamment en termes de désordre.
Ainsi, les fluctuations de la Bourse, l’écoulement d’un torrent, la propagation d’une épidémie et bien d’autres phénomènes ont révélé aujourd’hui que leur aspect désordonné résultait bien d’un désordre organisé occulté par notre première impression provisoire résultant de notre incompréhension. (Lire)
Notre foi en un ordre bien solide n’est plus.
Fait révélateur : des expressions comme « chaos », « structure chaotique », « attracteurs étranges », « milieu aléatoire », « désordre », « fractal », « complexité », tant d’expressions qui ont envahi la sphère scientifique à travers livres, revues, colloques, laboratoires, etc.
Ces conceptions d’ordre et de désordre variant selon les individus et les contextes, il n’est guère étonnant de voir certains glissements, vers le mystique ou le politique par exemple.
Qu’est-ce que le désordre ? En quoi un milieu « désordonné » diffère-t-il d’un milieu « ordonné » ? Ces interrogations tantôt philosophiques tantôt épistémologiques sont loin de faire l’unanimité même parmi les scientifiques.
Ainsi les découvertes du chaos déterministe ont révélé que des systèmes très simples peuvent évoluer de façon complexe et imprévisible ; que malgré un déterminisme de principe, une description probabiliste de ces systèmes est inévitable ; et cela n’a rien d’exceptionnel.
Les changements climatiques, les rythmes cardiaques, les mouvements au sein du système solaire, la vie économique, quasi tous les domaines sont concernés. L’imprévisibilité se retrouve, sous une autre forme, jusque dans les mathématiques pures. Les milieux désordonnés et leurs propriétés spécifiques intéressent de plus en plus les chercheurs et les ingénieurs dans les domaines de la physique de la matière. De même, pour la mécanique statistique, le désordre structurel est une donnée fondamentale : études des transitions de phase, des verres ou de la percolation. (Lire)
Autre problématique : comment la nature donne-t-elle naissance à des structure hybride, à mi-chemin entre ordre et désordre : dunes de sable, tourbillons, nuages, cristaux dendritiques, etc.
Ces différentes recherches, qui portent tant sur le monde vivant que sur l’atome, sur l’homme et la société attestent de la richesse et de l’actualité des notions d’ordre et de désordre. Cette nouvelle sensibilité émergente est une nouvelle manière pour la science de tenir compte de ses limites pour mieux les faire reculer. Notre vision du monde est en jeu.
Le paradoxe est : un désordre qui fait l’objet d’une « science » est-il encore un désordre ?
La structure même du mot, négative, ne peut se définir qu’en se référant (au moins implicitement) à une certaine conception de l’ordre.
Mathématiciens et physiciens ont pris l’habitude de rechercher l’ordre partout. Guidés par les modèles de l’astronomie, ils adoptaient les postulats métaphysiques de Platon : la « vraie réalité » est celle que constituent les formes ordonnées conçues par Dieu. Ils savaient bien que tout autour et à l’intérieur même de l’ordre établi par la science, il existait une multitude de désordres. Mais ceux-ci étaient considérés comme indignes de faire l’objet d’une véritable science. Ainsi, cette science platonicienne constatait par exemple des phénomènes irréguliers dans le ciel ; elle les étudiait et en trouvait des « lois » ; puis elle en tirait la conclusion que les désordres observés étaient seulement apparents. De nos jours, la situation est très différente. L’attitude actuelle d’un physicien par rapport à un phénomène chaotique est autre. Même avec un algorithme satisfaisant, il ne dit pas que le chaos est apparent. Il fait le constat d’avoir réussi à forger une image valide de ce chaos.
Qu’il s’agisse de matériau désordonné ou de processus turbulent, le chaos est souverainement reconnu.
Tout ce qui est bizarre et étrange pour reprendre le vocabulaire de Poincaré est en cours de modélisation. En ce sens, il existe bien une science du désordre.
Un autre aspect est philosophiquement important : l’ordre n’est plus considéré comme une réalité qui existe de plein droit et que l’homme de science a seulement mission de retrouver. L’ordre parfait n’existe pas. Non seulement il n’existe pas dans le monde matériel (Platon le savait) ; mais il n’existe nulle part comme une réalité première dont le physicien devrait postuler l’existence. Tous les phénomènes, selon une certaine échelle, sont désordonnés, irréguliers et irréductibles à des formes pures. Seul le désordre est premier et omniprésent.
Et l’on irait jusqu’à dire : « la science du désordre » retrouve le désordre réel derrière l’ordre apparent…
Ainsi, les fluctuations de la Bourse, l’écoulement d’un torrent, la propagation d’une épidémie et bien d’autres phénomènes ont révélé aujourd’hui que leur aspect désordonné résultait bien d’un désordre organisé occulté par notre première impression provisoire résultant de notre incompréhension. (Lire)
Notre foi en un ordre bien solide n’est plus.
Fait révélateur : des expressions comme « chaos », « structure chaotique », « attracteurs étranges », « milieu aléatoire », « désordre », « fractal », « complexité », tant d’expressions qui ont envahi la sphère scientifique à travers livres, revues, colloques, laboratoires, etc.
Ces conceptions d’ordre et de désordre variant selon les individus et les contextes, il n’est guère étonnant de voir certains glissements, vers le mystique ou le politique par exemple.
Qu’est-ce que le désordre ? En quoi un milieu « désordonné » diffère-t-il d’un milieu « ordonné » ? Ces interrogations tantôt philosophiques tantôt épistémologiques sont loin de faire l’unanimité même parmi les scientifiques.
Ainsi les découvertes du chaos déterministe ont révélé que des systèmes très simples peuvent évoluer de façon complexe et imprévisible ; que malgré un déterminisme de principe, une description probabiliste de ces systèmes est inévitable ; et cela n’a rien d’exceptionnel.
Les changements climatiques, les rythmes cardiaques, les mouvements au sein du système solaire, la vie économique, quasi tous les domaines sont concernés. L’imprévisibilité se retrouve, sous une autre forme, jusque dans les mathématiques pures. Les milieux désordonnés et leurs propriétés spécifiques intéressent de plus en plus les chercheurs et les ingénieurs dans les domaines de la physique de la matière. De même, pour la mécanique statistique, le désordre structurel est une donnée fondamentale : études des transitions de phase, des verres ou de la percolation. (Lire)
Autre problématique : comment la nature donne-t-elle naissance à des structure hybride, à mi-chemin entre ordre et désordre : dunes de sable, tourbillons, nuages, cristaux dendritiques, etc.
Ces différentes recherches, qui portent tant sur le monde vivant que sur l’atome, sur l’homme et la société attestent de la richesse et de l’actualité des notions d’ordre et de désordre. Cette nouvelle sensibilité émergente est une nouvelle manière pour la science de tenir compte de ses limites pour mieux les faire reculer. Notre vision du monde est en jeu.
Le paradoxe est : un désordre qui fait l’objet d’une « science » est-il encore un désordre ?
La structure même du mot, négative, ne peut se définir qu’en se référant (au moins implicitement) à une certaine conception de l’ordre.
Mathématiciens et physiciens ont pris l’habitude de rechercher l’ordre partout. Guidés par les modèles de l’astronomie, ils adoptaient les postulats métaphysiques de Platon : la « vraie réalité » est celle que constituent les formes ordonnées conçues par Dieu. Ils savaient bien que tout autour et à l’intérieur même de l’ordre établi par la science, il existait une multitude de désordres. Mais ceux-ci étaient considérés comme indignes de faire l’objet d’une véritable science. Ainsi, cette science platonicienne constatait par exemple des phénomènes irréguliers dans le ciel ; elle les étudiait et en trouvait des « lois » ; puis elle en tirait la conclusion que les désordres observés étaient seulement apparents. De nos jours, la situation est très différente. L’attitude actuelle d’un physicien par rapport à un phénomène chaotique est autre. Même avec un algorithme satisfaisant, il ne dit pas que le chaos est apparent. Il fait le constat d’avoir réussi à forger une image valide de ce chaos.
Qu’il s’agisse de matériau désordonné ou de processus turbulent, le chaos est souverainement reconnu.
Tout ce qui est bizarre et étrange pour reprendre le vocabulaire de Poincaré est en cours de modélisation. En ce sens, il existe bien une science du désordre.
Un autre aspect est philosophiquement important : l’ordre n’est plus considéré comme une réalité qui existe de plein droit et que l’homme de science a seulement mission de retrouver. L’ordre parfait n’existe pas. Non seulement il n’existe pas dans le monde matériel (Platon le savait) ; mais il n’existe nulle part comme une réalité première dont le physicien devrait postuler l’existence. Tous les phénomènes, selon une certaine échelle, sont désordonnés, irréguliers et irréductibles à des formes pures. Seul le désordre est premier et omniprésent.
Et l’on irait jusqu’à dire : « la science du désordre » retrouve le désordre réel derrière l’ordre apparent…