L’évolution du télétravail en France depuis la crise sanitaire

Paolo Garoscio
06/11/2024


Le télétravail, devenu un phénomène majeur pendant la crise sanitaire, continue de transformer l’organisation du travail en France. Des études de la Dares (Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques) publiées le 5 novembre 2024 dévoilent l’état de cette nouvelle organisation du travail et son évolution.



Une adoption croissante mais limitée du télétravail

La part des salariés ayant accès au télétravail a nettement augmenté ces dernières années. Selon les données de la Dares, seulement 9 % des salariés pratiquaient le télétravail occasionnel en 2019. Ce chiffre a triplé pour atteindre 26 % en 2023, soit environ 6,1 millions de salariés. Ce bond est en grande partie dû à la crise du Covid-19, où la proportion de télétravailleurs a atteint un pic, avec 42 % des salariés ayant expérimenté cette organisation de travail au moins une fois durant les confinements.

Toutefois, cette tendance est loin d’être uniforme : elle concerne surtout les cadres, avec une forte concentration dans des secteurs comme l’informatique, la communication, la finance et la banque, où 80 à 90 % des travailleurs peuvent télétravailler. En revanche, le télétravail reste largement inaccessible pour la quasi-totalité des ouvriers et une grande part des employés, avec 60 % des postes en France considérés comme "non télétravaillables".

Télétravail : une demande inégale et un accès partiel

En 2023, la Dares rapporte que près de 44 % des télétravailleurs souhaiteraient augmenter leur fréquence de télétravail, préférant une organisation flexible de deux à quatre jours par semaine. Cependant, seuls 8 % des salariés optent pour un télétravail intégral. Les inégalités d’accès se ressentent aussi selon le type de contrat et le sexe. La majorité des télétravailleurs sont en CDI ou fonctionnaires, tandis que seulement 8 % des personnes en CDD pratiquent le télétravail. Par ailleurs, les femmes représentent désormais plus de 50 % des télétravailleurs en 2023, contre 43 % en 2019, mais les responsabilités domestiques continuent de peser davantage sur elles, limitant leur temps de travail optimal à distance.

Les salariés en télétravail rapportent une meilleure autonomie et une réduction de la pression au travail par rapport à leurs homologues sur site. 33 % des télétravailleurs jugent plus facile de gérer leurs tâches sans interruption, ce qui améliore leur efficacité. Néanmoins, le télétravail entraîne une dégradation des relations professionnelles, notamment en réduisant les échanges informels et le soutien perçu de la part des collègues et des supérieurs. Le télétravail favorise en outre une meilleure conciliation entre vie professionnelle et personnelle pour de nombreux salariés, en réduisant le temps de trajet et en permettant plus de flexibilité dans les horaires. Cependant, cette organisation n’a pas réduit les inégalités domestiques : les femmes, même en télétravail, continuent d’assumer une grande part des tâches domestiques, un poids qui reste peu partagé avec leurs conjoints dans les foyers avec de jeunes enfants.