Ecologisme et radicalité, la Nature passe-t-elle avant l'Humain? Une analyse par Samuel Furfari

Lauria Zenou
01/09/2021


Professeur en géopolitique de l'énergie et ingénieur polytechnicien de l'Université Libre de Bruxelles, Samuel Furfari est aussi Président de la Société Européenne des Ingénieurs et Industriels. Ses fonctions de haut fonctionnaire à la Direction générale de l'énergie de la Commission européenne pendant trente-six ans lui ont permis d'expérimenter toutes les formes de dérives issues des mouvements écologistes. Ces extrémismes sont qualifiées d'écologisme et sont l'objet de l'ouvrage de Samuel Furfari paru chez VA Editions, "Ecologisme, assaut contre la société occidentale".



Estimez-vous que l’écologisme ait sa part de productivité au sein de la société ?

Il règne une certaine confusion dans l’esprit des gens en ce qui concerne les notions de pollution, d’environnement, d’écologie et d’écologisme. La pollution est avant tout une nuisance pour notre santé qu’il faut combattre avec détermination. J’y ai consacré 40 ans de ma vie professionnelle. En écartant les risques de pollution, on protège l’environnement, ce qui est aussi indispensable. Là n’est donc pas la question. Si l’écologie est une discipline scientifique qui étudie les relations du vivant à la nature, l’écologisme, par contre, est une doctrine idéologique qui prétend placer la nature au même niveau que lui — si pas au-dessus. Selon l’écologisme, l’homme n’a pas le droit d’exploiter la nature. Et pour imposer cette égalité homme-nature, il présente une solution : mettre fin au progrès qui a transformé en mieux la vie des gens depuis l’utilisation de l’énergie abondante et bon marché. Le corollaire est la limitation de la population, d’où les horreurs proposées pour atteindre l’élimination progressive et indolore d’au moins la moitié de la population. Il faut reconnaitre que cela n’a plus rien à voir avec la pollution. C’est notamment la raison pour laquelle je ne parle plus d’environnementalistes, mais d’écologistes.

Dans votre ouvrage, « Ecologisme, Assaut contre la société occidentale », vous considérez que l’écologisme nous a envahis. Mais s’opposer à l’écologisme, est-ce s’opposer à l’écologie ?

L’écologisme nous a envahis puisqu’il est désormais présent dans tous les domaines de notre vie et va même jusqu’à l’endoctrinement de nos enfants en bas âge. C’est en jouant sur la confusion des termes ‘pollution’ et ‘écologisme’ que les écologistes ont entrainé à leur suite la majorité de la population, par ailleurs inconsciente de la direction où elle est progressivement poussée. De plus, l’ennemi juré des écologistes est l’énergie et puisque tout — absolument tout — dans notre vie dépend de l’énergie, tous les domaines de notre vie en sont impactés.

Ces questions sont éminemment complexes et requièrent des notions scientifiques et techniques que la grande majorité des gens ne maitrisent pas ou ne désirent pas faire l’effort d’acquérir. Il suffit aux gens d’entendre que la pollution va détruire la vie de nos petits-enfants pour tomber dans le panneau de l’écologisme, sans même savoir ce que cela représente, non pas pour nos petits-enfants, mais pour nous dans l’immédiat. L’écologie est une science à laquelle il serait mal venu de s’opposer. Selon moi — et bien d’autres scientifiques amoureux de la nature comme moi — l’écologisme est une idéologie qui, sous prétexte de protéger l’environnement, ambitionne de renverser notre modèle de société occidentale.

Vous l’expliquez dans votre ouvrage, quelle est la dimension religieuse des mouvements écologistes actuels ?

De plus en plus de gens s’en rendent compte. On s’aperçoit que l’écologisme requiert, telle une religion, l’adhésion à des dogmes, de faire des disciples et hélas, aussi parfois d’obéir avec un militantisme parfois violent qui rappelle l’inquisition. Ce sont les fondateurs de cette idéologie qui l’ont établie. Par exemple, en 1967, l’Américain Lynn White Jr l’explique en termes non équivoques dans son essai « Les racines historiques de notre crise écologique ». Puisque les dirigeants écologistes se présentent comme neutres, tolérants et multiformes, ils parviennent à attirer vers eux une variété multiple de sectes, religions ou croyances. Contrairement au marxisme-léninisme qui a férocement combattu le chamanisme, l’écologisme est fondamentalement une nouvelle religion animiste. Pour reprendre les mots de certains catholiques qui, en rupture avec le pape François ― dont les sympathies écologistes sont évidentes ― l’occident abandonne le christianisme pour adopter cette nouvelle religion. 

Comme beaucoup de religions, l’écologisme est imbu de supériorité et moralisateur. Il suffit d’observer le zèle de ses activistes, les propositions écologistes, toutes liberticides et les contraintes tout aussi liberticides partout où l’écologisme est au pouvoir. Pour le bien commun il n’y a plus qu’obéir et se soumettre.

Adhérer à l’écologisme est-ce finalement s’opposer à toutes les idéologies conservatrices ?

On appelle un gestionnaire de musée un conservateur parce que son rôle consiste à préserver des trésors inestimables. Pour moi, le conservatisme consiste à préserver les apports indéniablement positifs de la société occidentale. Même le roi Soleil dans toute sa splendeur ne vivait pas aussi bien qu’un smicard d’aujourd’hui, et cela parce ce dernier dispose de l’énergie, ennemi juré des écologistes dont le rêve est d’en diminuer l’usage. Dans mon livre, je montre combien l’espérance de vie à la naissance et l’index de développement humain (un paramètre des Nations Unies qui sert à mesurer la qualité de vie) dépendent de la consommation d’énergie. Pour conserver ces avantages extraordinaires, il faut approvisionner les populations des pays en développement en énergie. C’est aussi là que ma profession m’a aidé à comprendre la supercherie de l’écologisme qui s’oppose aux avantages que le conservatisme veut offrir à toute la population mondiale.