Jean-Michel Germa
RSE Magazine : Dans un article des Échos d’aout 2009, vous déclariez, en parlant de votre jeunesse : « J'étais convaincu des vertus du vent, mais, après avoir visité les fermes près de San Francisco, je n'avais plus aucun doute ». Qu’est-ce qui vous a convaincu de ces vertus du vent ? Qu’est-ce qui vous fait croire, pendant les années 1980, en l’avenir des énergies renouvelables ?
Jean-Michel Germa : Juste après le premier choc pétrolier en 1973, le monde a réalisé quel était le coût véritable de l’énergie. La montée des prix des énergies traditionnelles a notamment eu pour conséquence de mettre le monde scientifique en ébullition. Il y avait à l’époque un véritable fourmillement d’idées nouvelles qui explorait les façons alternatives de produire de l’énergie.
C’est alors que s’est déroulée une véritable prise de conscience. Un besoin réel naissait pour ce que nous appelions alors les « énergies nouvelles », et que nous appelons aujourd’hui les énergies renouvelables. Lorsque j’ai visité les premières exploitations éoliennes d’envergure industrielle, nous nous trouvions au milieu des années 1980 et le monde commençait à envisager l’impact de sa consommation d’énergie sur l’environnement.
C’est dans ce contexte que j’ai rencontré des entrepreneurs à San Franciso, mais aussi au Danemark, qui développaient des technologies comme l’éolien ou le solaire. Dans ces pays, les industriels étaient aidés, par des incitations fiscales notamment, à développer ces modes de production d’énergie qui n’avaient été utilisés jusqu’alors que de façon artisanale. Très tôt, il leur est apparu que l’éolien était la source d’énergie renouvelable présentant le moins de risque et étant la plus compétitive économiquement. C’est notamment grâce à leur expérience que j’ai décidé de me lancer moi-même dans le secteur de l’éolien, plutôt que dans le nucléaire comme le faisaient la plupart des scientifiques de l’époque qui avaient le même profil que moi.
C’est alors que s’est déroulée une véritable prise de conscience. Un besoin réel naissait pour ce que nous appelions alors les « énergies nouvelles », et que nous appelons aujourd’hui les énergies renouvelables. Lorsque j’ai visité les premières exploitations éoliennes d’envergure industrielle, nous nous trouvions au milieu des années 1980 et le monde commençait à envisager l’impact de sa consommation d’énergie sur l’environnement.
C’est dans ce contexte que j’ai rencontré des entrepreneurs à San Franciso, mais aussi au Danemark, qui développaient des technologies comme l’éolien ou le solaire. Dans ces pays, les industriels étaient aidés, par des incitations fiscales notamment, à développer ces modes de production d’énergie qui n’avaient été utilisés jusqu’alors que de façon artisanale. Très tôt, il leur est apparu que l’éolien était la source d’énergie renouvelable présentant le moins de risque et étant la plus compétitive économiquement. C’est notamment grâce à leur expérience que j’ai décidé de me lancer moi-même dans le secteur de l’éolien, plutôt que dans le nucléaire comme le faisaient la plupart des scientifiques de l’époque qui avaient le même profil que moi.
Vous avez fondé votre entreprise en 1989, comment considérait-on à l’époque l’écologie de manière générale ? Comment avez-vous réussi à convaincre associés, investisseurs ou banquiers de la pertinence de votre projet ?
Jean-Michel Germa : Une dizaine d’années seulement avant le lancement de La Compagnie du Vent en 1989, l’écologie n’avait aucune visibilité et le grand public ne la connaissait pas. Quelques scientifiques précurseurs, tels que René Dumont, s’efforçaient, depuis le milieu des années 1970, d’informer les gens et de partager avec eux leur découverte et leur prise de conscience. Mais à l’époque, les questions d’énergies demeuraient des sujets purement régaliens – dépendant de stratégies industrielles et militaires – et principalement déterminés par des considérations de rentabilité.
Les préoccupations environnementales ne sont venues télescoper les thématiques énergétiques qu’à partir des années 1980. Ce n’est qu’à cette époque que les thèses écologiques ont commencé à peser quelque peu dans les considérations des gouvernements européens, en Europe du nord tout d’abord, puis dans le reste du continent.
J’ai donc commencé mon activité dans un contexte relativement réceptif aux propositions de l’éolien, mais tout restait à faire. Je me souviens par exemple m’être rendu chez un banquier pour trouver de quoi financer un projet qui allait devenir le premier parc éolien français. Mes interlocuteurs de l’époque, notamment l’ingénieur-conseil de la banque, ne m’avaient pas caché leur scepticisme. Les fluctuations du vent leur faisaient notamment très peur ainsi que la solidité des pales qu’ils trouvaient trop longues. Avec le temps cependant, on s’est aperçu que la production des éoliennes était en réalité assurée à plus ou moins 20 % d’une année à l’autre et quelle était en grande partie prédictible. Il a fallu plusieurs années pour faire comprendre aux banquiers et aux investisseurs que cette activité était pérenne et qu’elle pourrait rembourser ses prêts. Leur opinion à l’égard de la filière a ainsi bien changé. Aujourd’hui, ils apprécient les marges opérationnelles des parcs éoliens, qui sont bien plus facile à prédire que celles des énergies concurrentes dont les revenus dépendent de nombreux facteurs difficilement contrôlable par eux, telle que l’évolution du prix des énergies fossiles, dont on sait que leur coût ne peut qu’augmenter à moyen long terme, même si à court terme des fluctuations à la baisse sont observées.
Les préoccupations environnementales ne sont venues télescoper les thématiques énergétiques qu’à partir des années 1980. Ce n’est qu’à cette époque que les thèses écologiques ont commencé à peser quelque peu dans les considérations des gouvernements européens, en Europe du nord tout d’abord, puis dans le reste du continent.
J’ai donc commencé mon activité dans un contexte relativement réceptif aux propositions de l’éolien, mais tout restait à faire. Je me souviens par exemple m’être rendu chez un banquier pour trouver de quoi financer un projet qui allait devenir le premier parc éolien français. Mes interlocuteurs de l’époque, notamment l’ingénieur-conseil de la banque, ne m’avaient pas caché leur scepticisme. Les fluctuations du vent leur faisaient notamment très peur ainsi que la solidité des pales qu’ils trouvaient trop longues. Avec le temps cependant, on s’est aperçu que la production des éoliennes était en réalité assurée à plus ou moins 20 % d’une année à l’autre et quelle était en grande partie prédictible. Il a fallu plusieurs années pour faire comprendre aux banquiers et aux investisseurs que cette activité était pérenne et qu’elle pourrait rembourser ses prêts. Leur opinion à l’égard de la filière a ainsi bien changé. Aujourd’hui, ils apprécient les marges opérationnelles des parcs éoliens, qui sont bien plus facile à prédire que celles des énergies concurrentes dont les revenus dépendent de nombreux facteurs difficilement contrôlable par eux, telle que l’évolution du prix des énergies fossiles, dont on sait que leur coût ne peut qu’augmenter à moyen long terme, même si à court terme des fluctuations à la baisse sont observées.
Vous êtes devenu en moins de deux décennies le leader français dans le domaine des énergies renouvelables, en particulier éoliennes. Comment avez-vous vu (et fait !) évoluer la technologie ?
Jean-Michel Germa : À l’époque, la technologie éolienne n’était pas compétitive mais je dois confesser que lorsque je me suis lancé dans l’aventure éolienne, j’étais persuadé qu’elle le deviendrait un jour, comme l’énergie hydraulique et pour les mêmes motifs. La démarche pouvait paraître fantasque, mais j’étais notamment convaincu qu’un changement de méthode de calcul du coût de l’énergie permettrait à l’éolien de figurer parmi les modes de production d’énergie les plus compétitifs, surtout pour la collectivité. De fait, dès le milieu des années 1980, les scientifiques ont commencé à prendre en compte plus systématiquement les coûts externes liés à la production d’énergies fossiles ou nucléaires – coûts de dépollution, coûts de retraitement des déchets, coûts sociaux, … – que ne supportent pas les énergies renouvelables telles que le vent et le soleil. Cette démarche a depuis permis de démontrer que l’éolien, puis le solaire arrivaient en tête des énergies les moins coûteuses, tant pour les consommateurs que pour la collectivité qui supporte les coûts externes des énergies fossiles et nucléaires.
Une deuxième évolution technologique a considérablement influencé le développement de l’éolien. Il s’agit de la course à la taille. Dans les années 1975-1980, la puissance unitaire des éoliennes était de l’ordre de 200 à 300 kilowatts. Aujourd’hui, on est plutôt dans une fourchette comprise entre 3 et 6 mégawatts, soit pratiquement dix fois plus. L’économie d’échelle est importante. Si bien que le coût de production du kilowattheure pour un site éolien moyennement venté rivalise désormais avec toutes les énergies fossiles. Seule l’hydraulique parvient, dans certaines configurations, à faire mieux que l’éolien. Enfin, il faut rappeler que les aérogénérateurs ont l’immense avantage d’être des machines extrêmement fiables, qualité très appréciées de ceux qui ont en charge la distribution de l’électricité aux consommateurs. Le taux de disponibilité d’une éolienne moderne atteint en effet plus de 95%. Mis à part le solaire photovoltaïque, aucun autre dispositif de production d’énergie ne requiert moins de maintenance et ne dispose d’un taux de disponibilité aussi fort.
Une deuxième évolution technologique a considérablement influencé le développement de l’éolien. Il s’agit de la course à la taille. Dans les années 1975-1980, la puissance unitaire des éoliennes était de l’ordre de 200 à 300 kilowatts. Aujourd’hui, on est plutôt dans une fourchette comprise entre 3 et 6 mégawatts, soit pratiquement dix fois plus. L’économie d’échelle est importante. Si bien que le coût de production du kilowattheure pour un site éolien moyennement venté rivalise désormais avec toutes les énergies fossiles. Seule l’hydraulique parvient, dans certaines configurations, à faire mieux que l’éolien. Enfin, il faut rappeler que les aérogénérateurs ont l’immense avantage d’être des machines extrêmement fiables, qualité très appréciées de ceux qui ont en charge la distribution de l’électricité aux consommateurs. Le taux de disponibilité d’une éolienne moderne atteint en effet plus de 95%. Mis à part le solaire photovoltaïque, aucun autre dispositif de production d’énergie ne requiert moins de maintenance et ne dispose d’un taux de disponibilité aussi fort.
Les opposants à l’énergie éolienne n’ont de cesse de décrier les inconvénients supposés des énergies renouvelables (pics de consommation, influence de la météo, coût et rendement…). Que leur répondez-vous ?
Jean-Michel Germa : On entend parfois que l’éolien fait du bruit, qu’il défigure les paysages. Mais en se penchant sur ces critiques, on réalise finalement qu’elles ne portent pas sur le fond. Qui plus est, elles se trouvent être généralement fausses. Pour ce qui est du bruit par exemple, une éolienne de trois gigawatts est plus silencieuse qu’une machine à laver. Quant aux considérations esthétiques, très subjectives finalement, on peut leur répondre qu’une seule éolienne peut produire de l’énergie pour une ville de 3000 à 6000 personnes. On est donc loin des visions caricaturales selon lesquelles il faudrait couvrir la planète d’éoliennes pour arriver à un seuil de production d’énergie intéressant avec cette technologie.
Quelle sera ou quelle devrait être selon vous la place de l’éolien parmi les autres énergies renouvelables ?
Jean-Michel Germa : Entendons-nous bien : je ne pense pas que l’éolien peut ou doit subvenir à la totalité des besoins énergétiques. Mais c’est une énergie qui a sa place dans notre société. L’éolien ne me semble par exemple pas la source d’énergie la plus indiquée pour les villes. Prenez des territoires ruraux en revanche, et cette technologie peut faire des merveilles.
Une commune de 20 000 habitants nécessite 4 ou 5 machines de 5 mégawatts pour pourvoir à l’intégralité de ses besoins en électricité. Un tel modèle énergétique ne nécessite pas d’implanter une éolienne à côté de chaque maison, ni même de faire sortir de terre d’énormes parcs éoliens. Mais il a le mérite d’être écologique, parfaitement neutre sur le plan environnemental et entièrement viable sur le plan énergétique.
Encore une fois, un tel modèle n’a pas vocation à s’appliquer partout. Tous les territoires n’ont pas la capacité de produire leur énergie grâce à l’éolien (mais tous l’ont vraisemblablement à partir d’un bouquet renouvelable associé à des économies d’énergie). Les communes les plus ventées peuvent espérer tirer parti de cet avantage. Les moins ventées, en revanche, n’ont pas forcément intérêt à investir dans cette technologie. Cependant, celle-ci n’en reste pas moins une option très avantageuse pour un très grand nombre de collectivités. Elle offre une solution adaptée à l’échelle des communes de taille petite ou moyenne, car l’éolien est une option intermédiaire entre les grandes centrales thermiques, qui supposent une très forte concentration de la production d’énergie, et l’énergie photovoltaïque, qui produit au contraire de façon très décentralisée. On pourrait dire que l’éolien est une énergie de « proximité relative ».
Une commune de 20 000 habitants nécessite 4 ou 5 machines de 5 mégawatts pour pourvoir à l’intégralité de ses besoins en électricité. Un tel modèle énergétique ne nécessite pas d’implanter une éolienne à côté de chaque maison, ni même de faire sortir de terre d’énormes parcs éoliens. Mais il a le mérite d’être écologique, parfaitement neutre sur le plan environnemental et entièrement viable sur le plan énergétique.
Encore une fois, un tel modèle n’a pas vocation à s’appliquer partout. Tous les territoires n’ont pas la capacité de produire leur énergie grâce à l’éolien (mais tous l’ont vraisemblablement à partir d’un bouquet renouvelable associé à des économies d’énergie). Les communes les plus ventées peuvent espérer tirer parti de cet avantage. Les moins ventées, en revanche, n’ont pas forcément intérêt à investir dans cette technologie. Cependant, celle-ci n’en reste pas moins une option très avantageuse pour un très grand nombre de collectivités. Elle offre une solution adaptée à l’échelle des communes de taille petite ou moyenne, car l’éolien est une option intermédiaire entre les grandes centrales thermiques, qui supposent une très forte concentration de la production d’énergie, et l’énergie photovoltaïque, qui produit au contraire de façon très décentralisée. On pourrait dire que l’éolien est une énergie de « proximité relative ».
Dans ces conditions, quels seraient selon vous les moyens nécessaires pour réussir une « transition énergétique » en France ?
Jean-Michel Germa : La transition énergétique est une tendance inéluctable. Nous y arriverons nécessairement en raison de la raréfaction des énergies fossiles et de la non compétitivité de l’énergie nucléaire à niveau de sécurité acceptable. La question est alors de savoir combien de temps cela prendra. Je pense pour ma part que la transition énergétique pourrait se faire très rapidement avec le soutien de l’État. Il faudrait pour cela que les pouvoirs publics développent une politique énergétique décomplexée en faveur des énergies renouvelables et radicalement différente de la stratégie du tout nucléaire qui a été poursuivie durant les quinze dernières années.
Et même si cette stratégie nécessite la mise en place d’aides au développement des énergies renouvelables qui en ont encore besoin, ce n’est ni grave ni exotique. Car en leurs temps, l’exploitation du charbon a été considérablement aidée par les états, celle du pétrole n’aurait jamais décollé si les compagnies pétrolières avaient dû construire elles-mêmes les infrastructures pour écouler leur production. Le nucléaire est également le fruit d’une politique publique de subvention. La liste est longue et nous rappelle que l’état du marché français de l’énergie et l’existence de grandes compagnies monopolistiques (historiques et de fait) ne sont pas le fruit du hasard et ne correspond peut-être plus à l’optimum économique des énergies décentralisées.
Et même si cette stratégie nécessite la mise en place d’aides au développement des énergies renouvelables qui en ont encore besoin, ce n’est ni grave ni exotique. Car en leurs temps, l’exploitation du charbon a été considérablement aidée par les états, celle du pétrole n’aurait jamais décollé si les compagnies pétrolières avaient dû construire elles-mêmes les infrastructures pour écouler leur production. Le nucléaire est également le fruit d’une politique publique de subvention. La liste est longue et nous rappelle que l’état du marché français de l’énergie et l’existence de grandes compagnies monopolistiques (historiques et de fait) ne sont pas le fruit du hasard et ne correspond peut-être plus à l’optimum économique des énergies décentralisées.
Pensez-vous que l’environnement économique est suffisamment propice au développement d’entreprises dans le domaine des énergies renouvelables ? Quelles seraient selon vous les solutions pour optimiser ce développement ?
Jean-Michel Germa : Je souhaiterais que les pouvoirs publics donnent à leur tour leur chance aux énergies renouvelables et aux nombreuses PME qui les développent. Je parle d’une vraie chance, et non pas de simples effets d’annonce. Je vous rappelle, qu’aujourd’hui au niveau mondial, l’énergie la plus subventionnée est le pétrole, et au niveau national c’est le nucléaire. Dans ces conditions, entrer résolument dans la transition énergétique, avant qu’elle ne s’impose à nous, permettrait sans aucun doute d’économiser des sommes considérables affectées à des énergies qui n’en ont plus besoin et de les affecter à la création d’emplois durables, et non délocalisables, dans les entreprises d’énergie renouvelable. C’est le fameux effet « gagant-gagant » qu’aucun état ne peut plus ignorer. Pour les énergies vertes, l’enjeu est donc aujourd’hui de tenir le coup jusqu’à ce que le politique se décide enfin à leur tendre la main !
Est-ce que l’écologie est vraiment compatible avec le monde de l’entreprise ? Le « management écologique » est une réalité selon vous ?
Jean-Michel Germa : C’en est une ; elle est d’ailleurs fondamentale et très importante. Car le moteur d’une entreprise ne peut pas être le seul profit. Il y a encore quelques années, dans le secteur de l’énergie, les entreprises de production d’électricité étaient incitées à augmenter leur production dans le seul but de rentabiliser le capital investi. Lorsqu’il a s’agit par exemple de lancer le programme électro-nucléaire français, après avoir constaté que la consommation électrique de la France n’était pas suffisante en volume pour rentabiliser une filière industrielle, on a lancé en parallèle le chauffage électrique pour augmenter la consommation et atteindre ainsi le seuil permettant, grâce à un prétendu effet d’échelle, de baisser le coût du kilowattheure. Et, lorsqu’on s’est rendu compte que le chauffage électrique ne permettait pas de rentabiliser les investissements de production (on a pas besoin de chauffage en été), on a pas hésité à encourager la climatisation qui permet d’écouler la production estivale des centrales électriques. Personne ne s’est soucié du fait que la production d’énergie engendre des pollutions très préjudiciables pour la collectivité.
Ce type de raisonnement strictement économique pouvait être tenu dans les années 1960 par les grandes régies d’électricité et le gouvernement qui les supervisait. Aujourd’hui, ces mêmes acteurs ne peuvent pas suivre ce genre de raisonnement car l’opinion publique est consciente de l’impact environnemental qui résulte de ce type de gestion. On doit ce changement à la prise de conscience écologique que je vous décrivais plus tôt et qui est intervenu dans les années 1980. Je pense que le monde des affaires est contraint de se tourner vers une conception de l’économie plus attachée à l’utilité et à l’intérêt des consommateurs. C’est une évolution très positive.
Ce type de raisonnement strictement économique pouvait être tenu dans les années 1960 par les grandes régies d’électricité et le gouvernement qui les supervisait. Aujourd’hui, ces mêmes acteurs ne peuvent pas suivre ce genre de raisonnement car l’opinion publique est consciente de l’impact environnemental qui résulte de ce type de gestion. On doit ce changement à la prise de conscience écologique que je vous décrivais plus tôt et qui est intervenu dans les années 1980. Je pense que le monde des affaires est contraint de se tourner vers une conception de l’économie plus attachée à l’utilité et à l’intérêt des consommateurs. C’est une évolution très positive.
Comment avez-vous ressenti cette évolution des mentalités au sujet du développement durable et du réchauffement climatique ? Est-ce que cela s’est déroulé progressivement, de manière continue, ou y a-t-il eu des événements qui ont constitué des « chocs des consciences » ?
Jean-Michel Germa : Je parlerais plutôt de prise de conscience, car bien que son point de départ peut être situé dans les années 70/80, il s’agit d’une tendance de fond qui se poursuit encore jusqu’à aujourd’hui et continue d’être déterminante. La dernière étape en date a par exemple été la catastrophe de Fukushima (2011). En confirmant les enseignements tirés par des cas antérieurs et similaires, comme celui de Tchernobyl (1986) ou de Three Mile Island (1979), cet évènement a par exemple remis en cause un paradigme énergétique encore vivace jusqu’alors.
On pensait en effet qu’avec l’épuisement des énergies fossiles, le nucléaire prendrait l’ascendant dans le mix énergétique mondial. Ce n’est plus le cas désormais pour des raisons évidentes de compétitivité, notamment liée au coût de la sécurité. Aujourd’hui et de manière très conjoncturelle due en particulier aux gaz de schiste, c’est le gaz qui bénéficie d’un engouement similaire, mais on sait déjà que son exploitation est telle que la ressource sera bientôt tarie ; et elle le sera d’autant plus vite que le nombre de forages augmente. Dans ce contexte, les sources d’énergies qui apparaissent comme les plus pérennes et fiables sont les énergies renouvelables.
Et pour dissiper les doutes, on peut se pencher sur l’état du marché. Par exemple aujourd’hui en Europe, les capacités de production énergétique éoliennes croissent plus vite que celles des branches pétrolières ou nucléaires. Dans le monde, la croissance de l’éolien est la plus importante des filières énergétiques après celle du gaz. Le renouvelable est aujourd’hui une réalité économique qui représente annuellement des milliards d’euros d’investissement. À long terme, ces énergies se substitueront aux énergies traditionnelles, car le pari du renouvelable est gagné depuis bien longtemps. Ce discours n’a rien d’opportuniste : les énergies renouvelables, en seulement quelques décennies d’existence, ont lutté avec succès pour leur reconnaissance et tenu bon face à des intérêts concurrents qui ont tout fait pour que le public les rejette. En vain. Et malgré cela, ces technologies ont continué de galvaniser de plus en plus l’intérêt des collectivités, des scientifiques et même des financiers. Il manque véritablement peu de chose pour qu’elles se substituent aux énergies grises aujourd’hui !
On peut donc affirmer que la bataille des énergies renouvelables (que Jeremy Rifkin qualifie à juste titre de troisième révolution industrielle) est d’ores et déjà gagnée. Celle qui se présente maintenant et qui est aussi passionnante, est celle du stockage de l’énergie. C’est un corolaire des énergies renouvelables, mais c’est aussi une autre histoire que je vous raconterai lorsque les premiers chapitres auront été écrits par les nombreux scientifiques et entrepreneurs qui s’y consacrent avec créativité et détermination…
On pensait en effet qu’avec l’épuisement des énergies fossiles, le nucléaire prendrait l’ascendant dans le mix énergétique mondial. Ce n’est plus le cas désormais pour des raisons évidentes de compétitivité, notamment liée au coût de la sécurité. Aujourd’hui et de manière très conjoncturelle due en particulier aux gaz de schiste, c’est le gaz qui bénéficie d’un engouement similaire, mais on sait déjà que son exploitation est telle que la ressource sera bientôt tarie ; et elle le sera d’autant plus vite que le nombre de forages augmente. Dans ce contexte, les sources d’énergies qui apparaissent comme les plus pérennes et fiables sont les énergies renouvelables.
Et pour dissiper les doutes, on peut se pencher sur l’état du marché. Par exemple aujourd’hui en Europe, les capacités de production énergétique éoliennes croissent plus vite que celles des branches pétrolières ou nucléaires. Dans le monde, la croissance de l’éolien est la plus importante des filières énergétiques après celle du gaz. Le renouvelable est aujourd’hui une réalité économique qui représente annuellement des milliards d’euros d’investissement. À long terme, ces énergies se substitueront aux énergies traditionnelles, car le pari du renouvelable est gagné depuis bien longtemps. Ce discours n’a rien d’opportuniste : les énergies renouvelables, en seulement quelques décennies d’existence, ont lutté avec succès pour leur reconnaissance et tenu bon face à des intérêts concurrents qui ont tout fait pour que le public les rejette. En vain. Et malgré cela, ces technologies ont continué de galvaniser de plus en plus l’intérêt des collectivités, des scientifiques et même des financiers. Il manque véritablement peu de chose pour qu’elles se substituent aux énergies grises aujourd’hui !
On peut donc affirmer que la bataille des énergies renouvelables (que Jeremy Rifkin qualifie à juste titre de troisième révolution industrielle) est d’ores et déjà gagnée. Celle qui se présente maintenant et qui est aussi passionnante, est celle du stockage de l’énergie. C’est un corolaire des énergies renouvelables, mais c’est aussi une autre histoire que je vous raconterai lorsque les premiers chapitres auront été écrits par les nombreux scientifiques et entrepreneurs qui s’y consacrent avec créativité et détermination…